Méditation littéraire [Arghann Mantel]

Samedi 18 septembre
9h34

Depuis son arrivée à l’école il n’avait pas fait grand-chose, il s’était installé, il avait exploré les lieux en compagnie de Morgat, des cachots à l’observatoire, sans oublier de faire un tour dans le vaste domaine. Ils étaient allés visiter l’observatoire mais elle n’avait pas voulu se mêler à ses congénères, ceux qu’elle considérait comme de stupides batraciens.
Il était heureux de se trouver, l’école lui plaisait, ce domaine vaste et inconnu se montrait riche en surprises. Ici il ne connaissait personne et ne comptait pas attendre bien longtemps avant de se faire de nombreux amis. Les élèves s’étaient montrés intéressants et enseigner ses deux matières le passionnait.

Il n’avait pas dormi de la nuit, préférant aller contempler le ciel étoilé, allongé dans l’herbe fraîche. Il était persuadé que les étoiles étaient des esprits, peut être pas ceux des morts, de douces nymphes ou quelques déesses sans doute, un jour peut être qu’il réussirait à les appeler. Morgat s’était lovée contre lui, elle dormait tranquillement, simplement heureuse d’être aux côtés de son maître.

Le soleil colora bientôt la partie Est du ciel, les tons orangés étaient les plus belles couleurs qu’il n’avait jamais vues, il adorait regarder les couchers et les levers de soleil, quoi de plus magnifique que le gigantesque astre du jour ? C’était lui qui irradiait le monde de sa douce lumière et de sa chaleur, celle là même qui était présente dans le cœur de chacun. Il sourit avant de se lever, réveillant Morgat.

- Allez viens ma belle !

Ils se lancèrent dans une folle course poursuite où tantôt il courait après elle, tantôt c’était elle qui le poursuivait. Comme des gamins ils goûtaient au délicieux fruit du bonheur, ses rires résonnaient dans l’air alors que la plupart des habitants étaient encore pris par le doux sommeil.
Il finit par s’effondrer par terre, épuisé, alors que Morgat sautait sur lui pour lécher son visage. Il caressa le chacal puis s’assit en tailleur, fermant les yeux pour méditer.

Lorsqu’il les ouvrit à nouveau le soleil avait commencé son long chemin pour atteindre l’horizon à l’Ouest. D’après sa position il en déduit qu’on était encore tôt dans la matinée, le soleil était bien la seule chose qui pouvait lui indiquer approximativement l’heure.

Morgat le suivit jusqu’au réfectoire où il s’installa à une table vide, elle se coucha à ses pieds. Il avait seulement prit pour son petit déjeuner une grande tasse de thé, après tout s’il ne mangeait pas il n’en mourrait pas pour autant ! Il paraissait que pendant ce qu’ils appelaient le week-end tout le monde était libre de faire ce qu’il voulait, il semblait même qu’il n’y ait aucun cours, c’était plutôt curieux. En tout cas il cherchait bien ce qu’il pourrait faire, ne connaissant personne il n’avait pas très envie de déambuler dans les couloirs en attendant de trouver quelqu’un qu’il pourrait aborder. Il laissait cette affaire pour une autre fois. La bibliothèque paraissait être la meilleure occupation, on lui avait dit qu’elle était immense et qu’elle regroupait une multitude de savoir dont bon nombres de livres qu’on ne pouvait pas trouver chez un simple libraire. Il n’avait pas l’habitude de lire mais était plutôt curieux de voir ce qu’il pourrait y trouver.

Il se leva et suivit les couloirs qui allaient jusqu’à l’aile Ouest, Morgat qui commençait à connaître le chemin se mit à trottiner devant lui, ayant deviné les intentions de son maître.

En entrant il salua joyeusement la bibliothécaire avant de se perdre dans la contemplation de cette espace immense. Il flâna dans les rayons, admirant l’ampleur du savoir qui était recueilli ici. Il ouvrait au hasard quelques livres et lisait les lignes qui se présentaient à lui avant de les refermer, de les ranger et de partir en quête d’une lecture qui l’intéresserait un peu plus. Il finit par trouver son bonheur, un ouvrage qui relatait l’histoire de la nécromancie bien qu’il la connaisse déjà, elle remontait à des temps anciens, presque aux origines de ce monde.
Il se dirigea vers l’espace où de nombreuses tables avaient été mises à disposition, plusieurs personnes travaillaient, le nez plongé dans un ou plusieurs livres. Il admirait leur assiduité, lui qui connaissait si peu de choses en dehors de sa misérable existence !

Il s’installa à son tour, et se plongea avec délice et insouciance dans sa lecture, Morgat à ses pieds veillait sur lui.

c'était un matin comme il en avait déjà eu deux ou trois: des samedis qui lui apparaissaient presque totalement dénué d'intérêt; que ferait-il à part se lever, faire un tour au dehors et se demander, pour la millième fois peut-être, pour quelle raison il était venu dans cette école.
Il demeura quelques minutes allongé sur le dos, dans son lit, les yeux ouverts rivés sur le plafond, à essayer de faire sortir de son esprit les souvenirs et autres désagréments provoqués par les élèves de sa chambre. C'était l'une des raisons qui faisait qu'il aurait franchement préféré dormir dans une salle de classe ou pire encore, dans l'une des cellules du cachot. Mais au moins il y aurait été seul et n'aurait pas eu à subir les souvenirs émis par des étudiants qui n'arrivaient pas à se maîtriser lorsque leur esprit faisait surface pour une fraction de seconde, avant de replonger dans un sommeil de plomb. C'était ces moments-là qu'Årghann détestaient au plus haut point: il se réveillait alors parfois en sursaut, en proie à des cauchemars que son esprit avait crées grâce à ces souvenirs non souhaités, et ne parvenait pas vraiment à se rendormir par la suite, trop impressionnable qu'il était. Pourtant, au vu de ses "oeuvres d'art" on aurait pu penser que l'Ombre était plutôt insensible à ce genre de choses... mais force était de reconnaître qu'il était difficile de ne pas prendre peur lorsqu'on était sur le point de se faire tuer...

Finalement las de ses propres ruminations et autres pensées dont il se serait sûrement bien passé, il se leva, fit sa toilette, attrapa son sac dans lequel il cala son oeuf de Dragon et sortit prendre l'air. Il avait besoin de s'aérer l'esprit, de voir autre chose que des murs et des plafonds, ainsi que des élèves bizarres qu'il ne comprendrait jamais - qu'il n'avait pas envie de comprendre, surtout. -
Il marcha alors longuement dans le parc, ressassant quelques pensées plus ou moins sombres, se rappelant de ce qu'il avait à faire...
Ceci lui fit comme une gifle, et il se rappela qu'il avait pas mal de choses à faire... dont quelques recherches sur un certain reptile énorme et blanchâtre. Il courut donc jusqu'à la bibliothèque dans l'objectif de trouver - enfin - quelque chose de concluant. Et puis il souhaitait prendre des renseignements sur l'une des matière qui lui plaisait particulièrement, bien qu'il ne savait que trop penser du professeur.
Il y entra, salua d'un air un peu bougon la bibliothécaire avant de se diriger vers les rayonnages qui l'intéressaient. Il croisa quelques élèves déjà entrain de faire leurs devoirs, d'autres en train de lire quelques obscures livres. Il en profita pour attraper le livre des grands mythes des damnés, Moltchan et Ia Ivanov et alla vers quelques tables. Il serait bien qu'il se décidât enfin à se mettre sérieusement à ses études, s'il ne voulait être perdu...
Il aperçut alors un homme qu'il avait rencontré la veille même, et fut plutôt surpris de le voir à cet endroit-là à cette heure-ci. D'un autre côté... il y avait déjà pas mal de monde dans la bibliothèque.
- Bonjour professeur