Rite matinal [PV Årghann]

Nydan s'était levée tôt ce matin là, comme à son habitude en fait. Chaque jour, elle précédait le soleil dans sa course folle. Chaque jour, sans même prendre la peine de régler son réveil ses yeux s'ouvraient lentement et un besoin irrépressible s'emparait d'elle. Elle quitta son lit chaud et douillet, faisant le moins de bruit possible afin de ne pas déranger ses camarades encore profondément assoupies. Elle jeta un coup d'œil par la fenêtre, il faisait encore nuit noire. Ce matin elle avait le temps pourtant, ses cours ne commençaient pas avant 12h30, mais peu importe ce besoin impérieux était en elle depuis sa plus tendre enfance et lui apportait un tel bien être qu'elle n'y renoncerait pour rien au monde. Elle s'habilla chaudement car le soleil encore endormi laissait au froid le plaisir de s'installer. Mais dans quelques minutes cela n'aura plus d'importance de toute façon. Le froid, la sensation d'être à part malgré le fait d'être entouré de gens tellement différents, la peur de la solitude, tout cela s'évanouirait perdu dans les ondes glacées. Une fois habillée, Nydan se saisit d'un petit sac que chaque midi elle donnait à une dame de soie, qu'un jour, elle avait rencontré par hasard alors qu'elle s'était, une fois de plus, égarée dans le château et à qui elle avait confié son secret. Elle s'empara de sa sacoche, y plaça soigneusement son œuf chéri et sortit enfin sans un bruit.

Dans le dédale des couloirs, elle avait du mal à se retenir de courir vraiment, sentant son flux sanguin s'accélérer. Elle trottinait donc d'un pas léger, sa transformation commençant lentement. En sortant du château, son aspect avait déjà commencé à changer. Son regard était différent, ses yeux étaient devenus d'un bleu lumineux, son maintient était devenu bien plus gracile et majestueux. Elle continua à avancer mais cette fois elle courrait, ou plutôt dansait tellement ses mouvements étaient emprunts de grâce, à travers les allées du jardin. La lune pleine et protectrice éclairait pour elle le chemin.

Enfin, elle arriva à son but. Le lac. A peine essoufflée par sa course, Nydan déposa sa sacoche doucement sur le sol ainsi que son petit sac et commença à se dévêtir. Elle enfila rapidement une petite tunique légère, ayant appartenu à sa mère et ressemblant un peu à celle que portent les dieux romains sur les représentations antiques mais plus légère et plus fluide comme de l'eau. Elle prit tendrement son œuf et se détourna vers le lac laissant ses affaires au pied des saules pleureurs. Cette fois son aspect avait fini de changer. Ses yeux étaient devenus aussi bleu que le saphir qui ornait son doigt, son maintient à présent était gracieux et élégant et enfin, sa peau fine et diaphane brillait sous la lune comme si des milliers de diamants la recouvrait entièrement.

Elle avança vers l'eau sombre qui scintillait faiblement, elle ne ressentait plus le froid qui pourtant était vif ce matin là, elle ne voyait que cette eau si attirante. La nymphe fit un pas dans l'eau, puis un autre, le lac aurait du être plus que glacial pour une personne normale mais elle, elle ne sentait qu'une douce fraîcheur qui avait un effet apaisant. Plus aucune pensée quotidienne ne venait perturber ce moment de sérénité, proche de la transe. En ce moment, elle était nymphe. Pas comme tout les jours, où tant de beauté était amoindrie par les sens humains qui se mêlaient à ceux des nymphes. C'est d'ailleurs pour cela que Nydan avait inconsciemment mis en place ce rite matinal. Depuis le premier jour où cela était arrivé, tout ces bouleversements l'avaient profondément marqués. Car, lorsqu'elle vit le monde avec ses yeux de nymphe, elle en tomba amoureuse.

Elle s'enfonça dans l'eau jusqu'à sa taille fine. Ses cheveux détachés coulaient jusqu'en bas de son dos, la tunique qu'elle portait était mouillée et laissait deviner les formes naissantes de la jeune adolescente, à la fois sensuelles et pleines de candeur. Elle couvait son œuf du regard et le caressait, laissant l'eau les bercer lentement. Nydan se mit à chanter d'une voix douce et mélancolique pour son œuf et pour elle-même. L'eau formait autour d'elle un drap de soie fragile, que d'une main elle semblait caresser. La nature silencieuse faisait écho à son chant par sa quiétude.

Nydan avait toujours eu peur de dévoiler se secret et pire encore de le montrer à qui que ce soit autre que son père ou un animal. Même elle était parfois effrayée au début par la beauté surnaturelle qui se reflétant dans le miroir que lui offrait l'eau. Sa plus grande crainte était d'être rejetée et c'est pour cela qu'elle avait appris à maîtriser ses pulsions et à éviter de se baigner lorsqu'il y avait des gens aux alentours, car elle avait beaucoup de mal réprimer ce besoin naturel lorsqu'elle se trouvait près d'une étendue d'eau. La demi-nymphe jouait avec le précieux liquide, le transformant en petites sphères translucides qu'elle faisait flotter autour d'elle...

Cinq heures.

A cette heure-ci, tout le monde dormait dans l'école, pour le plus grand bonheur de l'Ombre. Il pouvait enfin déambuler dans les couloirs sans rencontrer personne, sans avoir à supporter le regard plus ou moins intrigués des élèves, ceux dans lesquels il rentrait parfois par mégarde.
Alors que là... le silence de l'école était total, rendant l'atmosphère enfin supportable pour lui.
Årghann déambula quelques temps dans les couloirs, appréciant ce moment de calme et de paix en intérieur, avant de se décider à aller dans le parc, puis près du lac, profiter du froid de l'automne.

Il arriva rapidement près de l'onde calme, s'assit le dos contre un arbre, et ferma les yeux quelques instant. Il se laissa gagner par la quiétude des lieux, et en oublia même le froid, plutôt mordant, de l'air.
Il en profita pour repenser à ses journées depuis qu'il était revenu à l'école, après deux mois de petits boulots pour des fermiers des alentours.
Ses journées s'étaient plutôt bien passées, quoique trop agitées parfois. Mais au moins, il avait éprouvé une certaine satisfaction à pouvoir suivre de nouveau des cours lui permettant de mieux se maîtriser. Bon, il avait certes eu de gros problèmes avec l'Invocation, mais il ne réitèrerait plus la bourde de ne pas suivre le cours consciencieusement.
L'Ombre sortit l'oeuf de Dragon de son sac, en caressa la coquille et se perdit dans la contemplation de cette coquille si parfaite.

Cette observation prit soudain fin avec une pensée parasite, une pensée qui s'insinua sournoisement dans son esprit et souhaitant ardemment se faire une place dans celles déjà assez embrouillées comme cela du jeune Ombre. Il tâcha de la refouler, et fronça les sourcils. C'était une sorte de souvenir, donc il y avait forcément quelqu'un qui se trouvait dans les parages.
Årghann soupira, remit son oeuf dans son sac et se leva, espérant apercevoir l'"intru". Qu'il ne vit naturellement pas. Cela l'exaspéra et décidé de s'ouvrir un tout petit peu à la vision qui s'était imposé en lui.
Une jeune fille aux cheveux bleus, qui parlait avec son père.
De nouveau il fronça les sourcils. Il ne se rappelait pas du tout s'il avait déjà vu cette fille à l'école, après tout cela était possible, mais vu comme il y prêtait attention...
Intrigué toutefois, il décida d'aller voir d'un peu plus près. Il ne vit toujours rien, mais entendit un chant, qui le perturba. Ce n'était pas un chant humain, aucun doute là-dessus. Ce qui n'était, à vrai dire, pas plus mal. Parce que les chants humains étaient souvent dépourvus de la beauté et de la grâce qu'avaient ceux de races telles que les Elfes ou les êtres féeriques en général.
Årghann se rapprocha de l'origine de la voix, et aperçut quelqu'un, dans l'eau. Ce n'était pas quelqu'un qu'il connaissait, aucun doute là-dessus. Il s'en rappellerait sûrement, parce que cette dame était toute en grâce et en douceur, loin de la plupart des habitants du château. Puis il vit quelques bulles d'eau s'élever lentement au dessus de l'eau et avec lesquelles la jeune demoiselle s'amusait.
Soudain il y eut un fort battement d'ailes, sûrement celui d'un corbeau, mais cela fit sursauter Årghann qui, pour le coup, rompit la branche à laquelle il se tenait, alertant par la même occasion l'inconnue du lac.
Il se morigéna lui-même et reporta son attention sur la demoiselle. Il ne savait pas vraiment ce qu'il pourrait apprendre de cette rencontre, mais sûrement quelque chose, parce que ce n'était pas courant pour une personne d'aussi jeune de se baigner dans une eau glaciale si tôt le matin.

Nydan se perdait dans la contemplation de ce qui l'entourait, son regard amoureux portant partout autour d'elle, caressant son œuf, le paysage alentour, son reflet dans l'eau et les sphères qui tournaient doucement autour d'elle de ses yeux de saphir. Lorsqu'elle était nymphe tout lui semblait magnifique, à cette heure encore plus. La nature l'entourait et elle ne se sentait plus partagée ainsi qu'elle l'était lorsqu'elle était dans son état quotidien. Soudain, un brusque craquement retentit déchirant le voile du silence qui régnait sur la nuit. Ce retournant, Nydan se retrouva face à un jeune homme qu'elle avait déjà rapidement aperçu lors du cours d'invocation.

Elle ne réagit pas tout de suite, toute à sa transe, elle plongea ses yeux encore emprunt d'amour et de sérénité. Son chant flottait encore dans l'air préservant quelques secondes la bulle dans laquelle elle se trouvait. Puis sa voix se brisa, son visage prit une expression horrifiée, les sphères qui l'entouraient retombèrent brusquement dans l'eau. La nymphe courut au pied du vieux saule sous lequel elle avait laissé ses affaires. La grâce qui s'attachait à chacun de ses gestes se perdit peu à peu et Nydan retrouva sa maladresse coutumière. Ne pouvant détacher son regard de celui du jeune homme qui lui faisait face, elle ne put dissimuler ses yeux embués de larmes qui peu à peu retrouvaient leur teinte noisette coutumière. La demi-nymphe voulut s'enfuir mais elle trébucha et tomba à genou sur le sol. Son visage s'empourpra et elle demeura là, prostrée, vulnérable et pleine de détresse. Qu'allait-elle faire? Si ce garçon en parlait, elle ne pourrait rester une minute de plus dans l'école, elle en était certaine. C'est ainsi que totalement offerte au joug de cet élève qu'elle connaissait à peine, qu'elle sembla rendre les armes. Elle attendit anxieuse que celui-ci réagisse.

Baissant enfin le regard, elle s'aperçut de la tenue dans laquelle elle se trouvait devant un parfait étranger et tenta de se cacher du mieux qu'elle pouvait, principalement à l'aide de son œuf qui paraissait aussi gros qu'elle mettant encore en avant sa fragilité. Le silence s'installa, pesant. Les questions se bousculaient dans la tête de Nydan. Pourquoi était-il ici à une heure pareille? Pourquoi était-il caché? L'épiait-il ou était-ce une simple coïncidence? Le froid repris peu à peu ses droits et la demi-nymphe se mit à frissonner. Les larmes coulaient sur ses joues sans qu'elle ne sache vraiment pourquoi. A cause de son secret? Ou bien à cause de sa maladresse maladive? Ou encore parce qu'elle avait peur des minutes qui allaient suivre?

Tout se passa très vite.
D'abord, la jeune femme mit un certain temps avant de se rendre compte que quelque chose ne se
passait pas comme de coutume. Et lorsqu'elle s'en rendit compte, elle jaillit hors de l'eau, à toute
allure, s'effondrant devant lui, le fixant de ses yeux noisettes empreins d'une peur qui le surprit.
A vrai dire, il ne comprenait même pas le quart de sa réaction; il l'avait vue se baigner, et alors? Cela arrivait tous les jours, lui qui était toujours dehors, il voyait parfois des choses assez... déplaisantes pour ses yeux et son mental. Et puis quand bien même c'était cela la principale cause de son malaise, elle n'avait pas à en avoir honte: elle n'était pas complètement nue, qu'il sût.
L'Ombre continuait d'observer la jeune fille, faisant abstraction des quelques souvenirs insidieux qui tentaient de se frayer un chemin dans son esprit. Elle pleurait encore, visiblement ne sachant pas trop ce qu'elle allait devenir. Elle tentait de se cacher avec son oeuf, presque aussi gros qu'elle, ce qui n'était, à son humble avis, pas une très grande réussite.

As-tu des souvenirs déplaisant, du type: voir des massacres partout autour de toi, ou d'autres où tu t'es sentie vraiment mal?

Son ton, à la fois glacial et cassant, n'avait absolument pas été étudié pour mettre en confiance la jeune fille en larmes. Au contraire, il essayait de se montrer le plus désagréable possible, histoire de ne pas avoir à se lier, plus tard, avec elle, d'une façon ou d'une autre.
Il avait appris, au fil de ses errances, que se lier aux gens était tout, sauf vital et bon pour la santé; toujours quelqu'un se retournerait contre quelqu'un d'autre, et tout cela finirait par devenir une sorte de guerre ouverte.

Ah. Et si tu te demandes pourquoi je te pose cette question, dis-toi simplement que
c'est parce que je possède le pouvoir du Temps, et qu'il m'est très pénible de devoir supporter des
images où le sujet est mal en point, un peu comme toi en ce moment précis.

Il considéra quelques secondes encore la jeune fille, puis lui demanda, presque du tac au tac.

Au fait, il faudrait que tu m'expliques pourquoi: un: tu te mets dans un état pareil. Deux: comment se fait-il que tu sois à présent transie de froid alors qu'il y a quelques minutes, tu te baignais dans cette eau plus que glaciale?

Årghann n'avait pas ménagé la jeune fille, bien au contraire. Il espérait ainsi qu'elle ne chercherait pas à le considérer comme un ami éventuel. Il ne voulait pas d'amis, ne voulait pas dépendre de quiconque. Même si cette jeune fille, à l'air si fragile, ne lui causerait probablement pas le moindre tord...

He bien... Tu ne vas tout de même pas rester ainsi prostrée. Tu n'as pas à te cacher.

L'Ombre lui tendit la main, et attendit qu'elle la lui prenne.

Le jeune homme qui lui faisait face était froid et méprisant, il transperça Nydan comme une flèche. Ce qui n'aida pas la jeune demi-nymphe déjà si timide à reprendre contenance. Il la surplombait de son maintient hautain et la toisait en attendant qu'elle décide à faire ou à dire quelque chose. Voyant qu'elle ne se décidait pas, il pris la parole d'une voix aussi froide, voire ennuyée, que son regard pour lui demander des choses horribles qui n'étaient pas fait pour rassurer la délicate jeune fille. C'est donc en bégayant qu'elle lui répondit:

- Heu...non...pas à ma co...connaissance...

Rouge comme une tomate, elle déglutit. Les révélations à propos de son pouvoirs que lui faisait le jeune homme l'impressionnèrent et sans même lui laisser le temps de dire un mot il enchaîna sur des questions qui embarrassèrent un peu la jeune fille. Mais elle s'y était attendue. Elle prit quelques secondes pour réfléchir à ce qu'elle allait dire, se disant que de toute façon elle n'avait rien à cacher puisqu'il avait vu de ses propres yeux sa nature féérique.

- Et bien...Comment dire...Disons que les deux réponses sont liées. Si tu m'observe bien, tu t'apercevras que je ne suis plus tout à fait la même que celle qui se baignait tout à l'heure...

Elle se tut à nouveau, laissant le temps au jeune inconnu de l'observer un peu, puis sa petite voix s'éleva à nouveau.

- Je suis...Ce que l'on pourrait appelée une hybride, ou bien une métisse, comme tu veux...Une part de moi...La plus maladroite et grossière pour caricaturer vient de mon sang humain. L'autre, celle que tu as aperçue tout à l'heure, est ma partie féérique...Mes origines Nymphes. C'est pour cela que mes pouvoirs se concentre sur la manipulation de l'eau et que je ne crains pas la froideur de l'élément liquide. Lorsque je suis seule je débride mes pouvoirs et je finis par me transformer en nymphe à chaque fois. Je suis mi-nymphe, mi-humaine. J'ai fait en sorte que cela reste secret car je ne veux pas que les autres me voient différemment que le plus normal des élèves de Maelthra Magthere...C'est dans ma nature d'essayer de me faire oublier, passer "incognito", comme on dit. Et voilà que tu me surprends, j'ai eu peur et puis tu as découverts mon secret maintenant...

La voix de Nydan se perdit et la jeune fille se resserra un peu plus autour de son œuf. Celui qui lui faisait face ne faisait rien pour la mettre à l'aise, bien au contraire. Et pourtant contre toute attente, celui-ci lui tendit la main l'air pensif et l'aida à se relever. La jeune demi-nymphe leva ses grands yeux noisettes où se peignait la curiosité face à un tel geste, tandis que ses lèvres s'étiraient en un petit sourire timide et charmant. Une fois debout, elle jeta un oeil à ses affaires et s'empara d'une cape qu'elle avait emportée car elle savait qu'elle serait frigorifiée. Puis à nouveau rose et embarrassée, elle se présenta.

- Peut-être que cela ne t'intéresse pas mais je m'appelle Nydan, Nydan Kedoa...

L'Ombre considéra la jeune fille avec étonnement. Ce pouvait-il d'avoir aussi peu confiance en soi au point de parler si bas, et d'avoir presque honte d'être une métisse? En tout cas, Årghann avait beaucoup de mal à la comprendre, et il avait beau essayer de voir en quoi être issu de parents humain et nymphe pouvait être un problème, ou même la faire passer pour quelqu'un d'anormal, surtout dans cette école, où les Vampires côtoyaient les Amazones nordiques et où l'un des fondateurs avait du sang de Drow dans les veines.
Il allait lui en faire la remarque lorsque la jeune fille, alors qu'il ne s'y attendait pas du tout, se présenta à lui. Cela l'agaça d'avoir été pris par surprise, voilà ce que c'était que de ne pas être concentré sur l'instant présent, mais de se perdre en réflexions qu'il fallait soit placer dans la conversation, soit taire une bonne fois pour toute.

La jeune demi-Nymphe sembla attendre qu'il daignât lui répondre. Il n'en avait pas envie. Pas encore, du moins... Il voulait d'abord savoir pourquoi avait-elle honte d'elle-même, ce n'était pas un comportement dont il avait l'habitude; de ce qu'il avait pu noter des gens c'était le plus souvent des êtres arrogants et imbus de leur personne, ou alors plutôt discrets, mais qui n'hésitaient tout de même pas à se manifester si besoin était. D'un autre côté... Il ne parlait pas à son entourage, c'était l'entourage qui venait à lui. Hors, quelqu'un de timide ne se manifesterait pas de son propre chef envers une autre personne, pas si cette dernière lui avait d'abord adressé la parole. Et une chose était sûre: si les gens timides ne prenaient pas les devants, ils le faisaient encore moins avec lui, qui préférait rester dans sa solitude et se murait derrière une paroi de glace qu'il ne faisait presque jamais fondre.

D'accord... Nydan. J'ai une question: as-tu honte de toi au point de vouloir te cacher des autres? Ou alors tu ne dis rien au sujet de tes origines, ou en tout cas de ta transformation, à quiconque pour une raison qui ne regarde que toi?

Son ton s'était légèrement adouci, sa question d'avantage poussée par la curiosité qu'autre chose; il ne souhaitait plus la faire fuir, en tout cas pas pour le moment, et espèrerait qu'elle l'éclairerait un petit peu sur ce mystère qu'il ne parvenait à éclaircir, et donc qui l'agaçait. D'un autre côté... Si elle ne lui répondait pas et repartait, pour x ou y raison, il n'aurait certes pas la réponse à sa question, mais au moins aucun risque pour qu'elle se liât à lui, d'une manière ou d'une autre...
Il attendit donc patiemment la réaction de son interlocutrice, cherchant à savoir ce qu'il avait comme cours ce matin-là, en attendant.